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« Je vis la plus belle expérience humaine de toute ma vie»

13/04/2020
En cette période un peu spéciale, nous avons souhaité vous montrer à travers des interviews le visage des femmes et des hommes qui travaillent au sein du Refuge. Avec plus de cent collaborateurs, certains d’entre eux se sont prêtés à l’exercice et se livreront à vous. Rencontre avec Maryse.

Peux-tu te présenter et nous indiquer quelle fonction occupes-tu au sein du centre d'accueil ?

Bonjour, je m'appelle Maryse, j'ai 45 ans. J'ai deux enfants de 15 et 13 ans et je vis dans le Tournaisis.

J'occupe la fonction d'agent d'accueil. Ma fonction consiste à accueillir les demandeurs d'asile à leur arrivée, les inscrire, les installer en chambre, leur expliquer le fonctionnement du centre ainsi que les différents services mis à leur disposition (médical, coordination, social, fonctionnement du restaurant ainsi que des différentes activités auxquelles ils peuvent participer....).

Mais aussi les rassurer et les aider dans leurs différentes démarches car les résidents passent d'abord par notre service avant d'être aiguillés vers les personnes compétentes.

 

Depuis quand travailles-tu chez Fedasil ?

J'ai commencé à travailler chez Fedasil Mouscron le 13 février 2019 lors de l'ouverture du centre.

 

Qu'est-ce qui t'a amené à t'orienter vers le secteur de l'accueil des demandeurs de protection internationale ?

J'ai travaillé durant vingt et une années pour le Ministère de la Justice dans le milieu carcéral.

J'y ai vu beaucoup de choses et rencontré énormément de personnes. J'ouvrais, je fermais des portes.  Et le soir venu, chez moi, je repensais à ma journée et à ce que j'aurais dû dire, faire ou ne pas faire. Mon rôle ne me convenait pas. J'avais envie d'aider et non d'enfermer.

J'aidais trop les détenus. Je devenais leur psy, leur assistante sociale, leur confidente parfois. Ce qui n'était absolument pas mon rôle et qui a posé problème à un moment donné. J'ai donc décidé de démissionner.

Par la suite, j'ai travaillé quatre mois dans un centre pour personnes handicapées. Mais là non plus, je ne me sentais pas à ma place. Par chance, une offre d'emploi est arrivée à moi, par hasard, un poste en tant qu’agent d’accueil chez Fedasil. J'y ai vu une opportunité et me suis dit qu'avec mon expérience, je pourrais apporter des choses à ces personnes qui recherchaient aide et protection.

 

As-tu un moment vécu au Refuge que tu souhaiterais nous partager ?

J'ai vécu plusieurs moments forts. Nous avions accueilli de nouveaux résidents arrivés un vendredi soir. La dame était en fin de grossesse. Le lundi, tout s’est enchaîné, contractions, urgence, ambulance, hôpital. Un quart d'heure plus tard, j'accompagnais le mari pour être auprès de sa femme. On nous annonce que le bébé arrive, qu'elle est en salle de travail. J’ai traduit dans mon bel anglais la nouvelle au futur papa et il a sauté dans mes bras en me remerciant chaleureusement. Je n’oublierai jamais ce moment.

 

Ensuite, une famille qui habitait le centre depuis plusieurs mois qui a reçu un OQT (obligation de quitter le territoire) du fait de leur procédure Dublin (Ils doivent se rendre dans le pays européen où ils ont effectué leur première demande d’asile). Nous avons accompagné la famille pour partir et là, les deux plus petits garçons ont couru vers moi et m’ont serré dans leurs bras pensant ne plus jamais me revoir. Surprise, deux mois plus tard, ils ont pu faire une demande d’asile en Belgique et ont pu réintégrer le centre. C’était très touchant.

 

En cette période de crise sanitaire, comment ton équipe travaille quotidiennement ?

En cette période difficile, nous travaillons du mieux que nous pouvons, en solidarité avec les autres services du centre.

Nous continuons  nos horaires de jour, de nuit, de weekend mais le travail est réparti différemment. C'est difficile, car pour ma part, je n'ai pas vu mes enfants depuis un mois afin de pouvoir venir travailler. Je ne veux leur faire courir aucun risque.

Nous nous entraidons et sommes très unis dans notre équipe. Il nous arrive parfois d’être fatigués et de ne pas avoir toujours le sourire dans cette période délicate mais nous sommes là et donnons tout ce que nous pouvons.

 

Un dernier mot ?

Je vis la plus belle expérience humaine de toute ma vie. C'est le job que je recherchais et je ne regrette en aucun cas d'avoir démissionné d'un emploi nommé et statutaire. Même si ça semble être un peu fou ! Mais d'après mes amis, mes collègues, derrière mon caractère fort se cache un petit grain de folie. 

J'y ai rencontré de belles personnes tant au niveau des résidents qu'au niveau collègues, de tous horizons et de différentes cultures. J'y apprends chaque jour grâce aux collègues qui sont devenus des amis. Nous sommes devenus une belle et grande famille.